PORTRAIT DE CHEF
Sébastien BRODA Park 45

Par Fabien Nègre

Relax briotin réjoui, l’excellent chef trentenaire de l’Hôtel PARK 45, sur la Croisette cannoise, comblé des soleils cisalpin et ibérique, Sébastien BRODA, ambitieux et modeste, concis et précis, sait oser conserver son silence dans l’éloquence de sa vigilance, s’essaie à une cuisine différente, rafraîchie d’alliances dialoguées entre les goûts des Suds.

En 1978, au cœur de la Meurthe-et-Moselle, dans ce bassin ferrifère si puissant aux balbutiements du XXème siècle, à Briey, un herculéen sort de terre. Le père, ancien sidérurgiste lorrain, quitte son histoire, pour rejoindre la Côte. La mère polonaise, «bonne cuisinière de maison», associée à la grand-mère paternelle, «excellent chef», initient la petite armoire à glace aux glaces et autres plaisirs culinaires variés. A 16 ans, à son arrivée dans le «pays bleu», Sébastien BRODA se révolte contre l’institution scolaire : «Je ne voulais plus jamais aller à l’école».


En visitant, par hasard, à Nice, la deuxième école hôtelière de France, la révélation gustative jaillit mais l’absence de brevet des collèges, trop de discrétion et d’invisibilité, le conduisent au refus de son dossier.



Le gentil courageux qui ne renonce jamais rentre en apprentissage au «Royal», à Antibes, pendant deux ans, puis passe son CAP. «Cuisine d’abord». Alain PARODI, l’un des chefs étoilés les plus créatifs de la Côte d’Azur, du restaurant «LOU CIGALON», à Valbonne, l’embauche. «Il m’a tout appris, le goût de la sélection des grands produits, l’humanité dans la cuisine, le travail collectif dans un dialogue permanent». Ensuite, Francis CHAUVEAU, au «Carlton», repéra son talent. Ce cursus azuréen bien loin de sa source lorraine, contribue, sans conteste, à l’originalité du style du jeune cuisinier. La fraîcheur de l’harissa se conjugue aux fruits et aux légumes. Le versant oriental espagnol où les épices règnent, en intime complicité, dans des desserts subtilement salés, procure une réelle mise en bouche.



La dynamique trilogique couleurs-saveurs-textures, métamorphose les Saint-Jacques en corolles iodées escortées de leurs betteraves multicolores. Ces essais disjonctifs bousculent les fondamentaux dans la continuité. «On part sur une base le midi, retravaillée le soir. Les cartes changent toutes les semaines». Loin des étoiles classiques, les productions ultra locales du moment passent au crible des recherches pointues de traçabilité pour des percées atypiques. Les plats tendus, «agrumés» ou «acidulés». Le mouvement déhanché de la mandarine ne dure que trois petites semaines. «On mange avec les yeux, le visuel prime tout». Cette demi-victoire qui précède la puissance gustative du «bien cuit, du bien assaisonné et de l’allégé», sans beurre, aux jus simples juste liés, formule la désirable fragrance adéquate du temps.



Sans complexes et sans limites, ces jeux de déclinaison de températures, creusés et poussés dans leurs propres cordes, exhibent une trilogie de chocolat aux poivres dans un surprenant continuum salé-sucré. Aucun assemblage dans cette disposition à la variabilité mais bien plutôt de l’audace réservée, de l’accroche indomptable. Les courgettes se blottissent dans le citron confit, rehaussé d’une mousse fromage blanc citron vert. Le macaron à la courge s’associe aux noix de coco-curry. Cette équipe de jeunes gens sensibles et décontractés à l’écoute de la complexité réceptive du client, ouvre grand son œil joueur. «Grâce à notre direction bienveillante et intelligente, nous faisons ce que nous aimons». Le piment oiseau et celui d’Espelette réveillent les langoustines. La mangue se détend dans une infusion de cardamome.



L’agrume, en émulsion ; la mélisse, en gelée ou en espuma, les concombres redécouverts, témoignent d’une imagination procréative. La cuisine côtière se fait légère, tel un vent des dames ou une brise de mer. «Les jeunes femmes, non seulement, adorent notre cuisine, mais viennent la dévorer, notamment la viande rouge». La découverte des altérités équilibre la vivacité des échappées. La thématique barcelonaise, les amitiés siciliennes, la transgression du terroir : autant d’angles fructueux qui esquissent un style méditerranéen contemporain curieux de toutes les rencontres. Ce devenir empli de suavité, de jeunesse joyeuse et soyeuse, amoureuse et libre, matérialise une ouverture d’esprit hors du commun sur la France et le monde.



La conversation taquine et complice entre les trois larrons, le chef, Sébastien BRODA, son second, Thomas MORETTO et Pascal PICASSE, son pâtissier, se poursuit dans l’avancée empathique. Ces échanges de trentenaires soudés depuis dix-sept ans, font plaisir à voir. «Une belle étoile plutôt que deux chancelantes».
 
 

LE PARK 45 SEBASTIEN BRODA

Le restaurant Le Park 45 est installé dans Le Grand Hôtel, sur la Croisette. En cuisine le chef Hervé Busson, ancien second...

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