PORTRAIT DE CHEF
Julien BURBAUD

Par Fabien Nègre

Hardi confolentais, édition Top Chef 2012, Julien BURBAUD, au FANFAN, explore les points d’altérité entre sa visée étoilée et ses visions asiatiques.    

A Confolens, cité de confluences, un petit, ferme dans ses desseins, tète le sein le 23 août 1983. En limousin occitan, les succulences garnissent les paysages : foie gras, pineau, cognac. Non loin, les trésors maritimes d’Oléron scintillent. Entourés par le potager de la maison, les chanfreins des lapins glapissent et les subtils volatiles codéquent. Le voyage scolaire s’étiole tôt mais le sentiment culinaire embrase : « A 6 ans, je voulais être un grand chef de cuisine, c’est inexplicable ». A 14 ans, lors d’une clémente après-midi, l’adolescent colle sa feuille au poste de la radio régionale.

La Chambre des Métiers de Chasseneuil-sur-Bonnieure lui déboucle la trouée du métier. Arrivé avec ses parents, le tenace repart avec son premier contrat d’apprentissage. Julien BURBAUD majore son CAP en deux ans. Même brio pour son Baccalauréat professionnel. A 16 ans, en solo, l’audacieux charentais traverse toute la France pour le Château de Lignan-Cambrésis dans le Nord. En trois ans, adoubé par trois chefs étoilés, il s’initiera aux grammaires de la gastronomie. « J’allais toujours au poste poisson les yeux fermés. Je voulais être connu et reconnu mais ma destinée était floue ».

A 21 ans, déjà sévère et habitué des tables primées, un dîner à « La Table de Joël ROBUCHON » dans le 16ème, le laisse bouche bée. « J’hésitais entre la carrière de critique gastronomique et celle de chef mais là, pour une fois, rien à redire ni à dire ». Ébahi, il retourne sur ses pas, apostrophe le directeur de l’établissement : « Je veux travailler chez vous ». Soucieux de se forger aux syntaxes des grandes maisons et de conquérir Paris, le futur membre des toques françaises aborde l’avenue Bugeaud par les classiques pétris de précision, en saucier et rôtisseur.

« Très violent, très dur mais fondateur et je voulais atteindre mon but ». Frédéric SIMONIN, alors bras droit du célébrissime poitevin, le remarque et l’embarque à Londres. « J’étais gamin, c’était loin, extravagant, je ne parlais pas un mot d’anglais, je fais l’ouverture. Au bout de 6 mois, je passe chef de partie et on prend une étoile puis deux ». A 24 ans, le courage affermit le caractère. Aimanté par l’Asie, avec son épouse d’origine cambodgienne, le Chef d’Yves SAINT-LAURENT durant les défilés de la Paris Fashion Week, dévore le monde. « Les voyages me titillent, nous travaillons beaucoup mais nous voyageons loin ».

Au Meurice, avec Yannick ALLENO et surtout Philippe MILLE, il découvre la graine de carvi dans une gelée de pomme. A « La Marée », avec Bernard LEPRINCE, MOF96, l’intrépide s’éblouit de l’argenterie à l’ancienne et des poissons de mer cuits entiers. Entre 2010 et 2012, au Caïus, le curieux des goûts d’ailleurs enregistrent toutes les épices « dans son cerveau ». L’aventure humaine « TOP CHEF » lui ouvre la folie des yachts.   « J’avais la phobie de l’eau, je ne savais pas nager. En six mois, avec des Russes, j’ai appris ce qu’était une clientèle exigeante qui veut tout, tout de suite, du matin au soir, en gastronomie. C’est le plus difficile. J’ai su trouver de la truffe et du caviar en pleine mer ».

L'ouverture, en 2013, du premier restaurant d’Hôtel péruvien, l’ « INKA » dans le 1K, complète un parcours d’une rare densité et d’une belle intensité. « Réinterpréter la cuisine péruvienne, équilibrer les palais entre les deux clientèles : deux missions enrichissantes ». Celui qui aime appartenir à la grande famille des chefs apprécie les échanges : « Quand on porte notre veste, nos médailles, les gens nous regardent comme des messies ». Depuis 2019, au FANFAN, le trentenaire bien dans son temps qui maîtrise les gastronomies sud-américaine, française et végétarienne exprime son style métissé, articulé autour de points d’ancrage ou pointes d’altérité entre la technicité hexagonale et certains éléments asiatiques (chinois, japonais, coréen).        

Mieux, cette fluidité contemporaine à la fois cosmopolite et singulière associe les goûts d’ailleurs et celui de l’ailleurs où les altérités s’harmonisent dans des chocs créatifs pensés en toute rigueur. « Une blanquette de veau m’ennuie. J’aime jouer, on est là pour s’amuser en cuisine. C’est ce que je dis toujours à mes gars. De chaque voyage, je rapporte un goût ». Julien BURBAUD customise le poulpe, prolétaire et noble, croustillant et fondant, tendre et profond. Les épices et les condiments twistent. Un wagyu japonais matche avec un basilic thaï et du citron caviar.

Le gras s’évanouit derrière la fraîcheur. Les bouchées doublent. Le feuille-à-feuille de pomme de terre fétichise la fève tonka. Le yuzu/avocat/thé Matcha provoque. « Je ne veux pas de produits nobles. L’Asie appelle des textures, des goûts, des épures, montées et descentes ». Julien BURBAUD risque le calme des jus, le mouvement des piments, les niveaux de modularité de l’acidité. « Pas d’ennui à table, de la parole, l’intensité du moment ». La mise en bouche interpelle tel un fragment de promesses.
 
La mignardise cristallise la mémorisation de la dernière bouchée. Un fin cercle de meringue au charbon végétal sourit à la violette et charnue Kalamata. Une aventure déconnectée, une expérience suspendue, une paix.
 
 

FANFAN

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